Reprise d’entreprise : puis-je refuser de travailler pour le repreneur ?

Reprise d'entreprise : Pouvez-vous refuser de travailler pour le repreneur ? Découvrez vos droits et la jurisprudence.

Publié le
21
Oct
.
2024
Mis à jour le
21
Oct
.
2024
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Ai-je le droit de refuser de travailler pour le repreneur, en cas de cession d’entreprise

En cas de cession d’entreprise, les salariés se questionnent quant à leur avenir dans l’entreprise et leurs conditions de travail…

Se pose alors la question de savoir quelle est la marge de manœuvre des salariés qui souhaitent quitter l’entreprise, à l’occasion de son rachat. 

Pour répondre à ces questions, le sujet est à analyser sous l’angle juridique du sort des contrats de travail puis de la jurisprudence. 

Sommaire :

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Le principe du transfert des contrats de travail en cas de reprise d’entreprise

Le Code du travail dispose que « tous les contrats de travail en cours au jour de la modification subsistent entre le nouvel employeur et le personnel de l’entreprise » (L.1224-1) ». 

Cette obligation de transfert des contrats de travail est « d’ordre public ». Cela signifie qu’elle s’impose aux employeurs successifs et aux salariés. 

Toutefois, plusieurs conditions doivent être réunies au préalable pour que ce principe du « transfert des contrats de travail » s’applique pleinement : 

  • Le transfert porte sur une « entité économique autonome ». C’est-à-dire qu’une partie de l’entreprise est cédée au repreneur (unité de travail ou branche d’activité). Cette branche d’activité doit pouvoir fonctionner pleinement, sans le reste de l’entreprise. 

Bien entendu, ce critère n’est pas requis lorsque l’intégralité de l’entreprise est cédée. 

  • L’entité économique doit conserver son identité et l’activité doit être continuée ou reprise.

Ainsi, si ces conditions sont remplies, le salarié ne pourra pas s’opposer au transfert de son contrat de travail, par principe. 

Toutefois, si ces conditions ne sont pas réunies, il sera nécessaire de vérifier l’existence d’un accord collectif conclu dans l’entreprise.

Il s’agit d’une pratique répendue. L’accord collectif est conclu entre l’ancien employeur, le repreneur et les instances représentatives du personnel.

Notons qu’un tel accord peut être remis en cause si les conditions de forme ne sont pas remplies ou s’il contrevient à certaines dispositions du Code du travail. La consultation d’un avocat spécialisé en droit du travail est alors fortement recommandée avant d’en contester l’exécution. 

Refus de travailler pour le repreneur : est-ce constitutif d’une démission ? 

Sur le plan de la jurisprudence, le cas du salarié qui refuse de travailler pour un repreneur en ne se présentant pas sur son lieu de travail, peut être qualifié de démission. En effet, la Cour de cassation a pu juger en ce sens. (cass.soc., 10 oct.2006, n°04-40.325). 

C’est bien le refus clair et non équivoque de travailler pour le repreneur qui constitue la démission et non la simple contestation (qu’elle soit individuelle ou collective). 

La qualification de démission s’interprète toutefois avec quelques réserves, car il y a bien des situations où le salarié est en droit de refuser de travailler pour le repreneur. 

Plus précisément, le salarié peut refuser de travailler pour le repreneur en cas de modifications de son contrat travail (cf. paragraphe suivant « Dans quels cas est-il possible de refuser de travailler pour le repreneur ?»). 

Rappelons aussi que le transfert des contrats de travail doit remplir plusieurs conditions préalables pour être valable (cf. paragraphe précédent « Le principe du transfert des contrats de travail en cas de reprise d’entreprise »). 

Par ailleurs, certaines exceptions s’appliquent : 

  • Pour la profession de journaliste : la clause de conscience des journalistes s’applique ici et leur permet de quitter le journal sans que cela soit qualifié de démission. Ils auront droit aux indemnités de licenciement en vertu de l’article L. 7112-5 du contrat de travail. 
  • Lorsqu’une clause du contrat de travail initial prévoit qu’un licenciement aux torts de l’employeur sera prononcé, dans certaines situations de reprise. 

Dans quels cas est-il possible de refuser de travailler pour le repreneur ? 

Que se passe-t-il si les conditions du contrat de travail initial du salarié sont modifiées par le repreneur ? 

Le principe du transfert automatique des contrats de travail implique que les conditions conclues initialement dans les contrats de travail restent inchangées. Tout changement à ce titre nécessite l’accord préalable du salarié concerné. 

Cela signifie, que le salarié retrouve les mêmes conditions de travail (substantielles) auprès du repreneur. Qu’il soit en CDI, CDD, à temps partiel ou à temps complet… 

De même pour l’éventuel accord d’intéressement en vigueur et les accords collectifs qui demeurent valables à l’identique, après le rachat de l’entreprise

En l’absence de maintien à l’identique des conditions de travail, le licenciement sera qualifié « d’économique » ou aux torts de l’employeur dans certains cas. 

Les salariés concernés seront alors dans leur bon droit et pourront toucher leur indemnité de licenciement ainsi que des dommages et intérêts dans certains cas.

Notons que les licenciements sont très encadrés, en cas de reprise d’entreprise. 

Il arrive parfois que certains employés « s’arrangent » auprès de leur ancien employeur pour être licenciés juste avant la cession. Cette pratique entraine bien souvent une remise en cause du licenciement pour nullité… (cass.soc.14 déc. 2004, n°03-41, 713). 

Pour ne pas être qualifié de contournement des dispositions d’ordre public en matière de cession d’entreprise, le licenciement doit être justifié par des motifs « personnels » ou de nature économique. Les licenciements économiques sont autorisés dans certains cas (comme indiqué plus haut) s’ils sont liés à la restructuration de l’organisation du travail (Cass.soc.,25 oct.2000, n°98-45.422 et cass. soc.,30 mai 1980).

Toutefois, les licenciements économiques qui interviennent juste après la cession de l’entreprise peuvent être considérés comme des contournements du dispositif de transfert des contrats de travail et entrainer ainsi des dommages et intérêts au bénéfice du salarié…

N'oublions pas la voie de la rupture conventionnelle qui reste une option intéressante dès lors que les parties y trouvent un avantage réciproque… 

FAQ 

Mon patron vend son entreprise, puis-je demander une rupture conventionnelle ? 

Il est tout à fait possible de conclure une rupture conventionnelle avec votre employeur actuel, avant la cession de l’entreprise. 

Toutefois, il convient d’être particulièrement vigilant quant aux conditions de fond et de forme, pendant cette période. En effet, une rupture conventionnelle peut être contestée dans les 12 mois de son homologation, il est donc important qu’elle ne souffre d’aucune irrégularité, car le repreneur pourrait s’y opposer à terme… (y compris concernant le versement de l’indemnité ou son évaluation…). 

Quelles sont les obligations du repreneur à l’égard des contrats de travail en cours ? 

Le transfert des contrats de travail signifie que les contrats sont transférés « en l’état ».

Le repreneur doit s’assurer de ne pas modifier l’ancienneté du salarié, le niveau de qualification, la rémunération et les avantages acquis. 

Les avantages acquis conservés sont : la clause de mobilité, la voiture de fonction, le logement de fonction ou encore la clause de non-concurrence. 

Dans le cas où le repreneur n’est pas en mesure de maintenir certains éléments du contrat de travail, l’accord préalable du salarié est requis. 

Sources & ressources utiles :
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